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Bataille
Siège d'Anvers (1584-1585)

La division finale des Pays-Bas.

Siège d'Anvers (1584-1585)

Informations sur la bataille

  • Anvers
Quand
3 juillet 1584 - 17 août 1585
Conflit
  • Guerre de Quatre-Vingts Ans
Parties belligérantes
  • République d'Anvers
  • Hollande et Zélande (Union d'Utrecht)
Empire hispano-habsbourgeois
Forces en présence
  • env. 20 000
  • env. 200 navires
  • entre 80 000 et 100 000 habitants
initialement entre 8000 et 10 000
Victimes
env. 8 000
env. 1800
Chefs des armées
Philippe de Marnix de Sainte-Aldegonde
Alexandre Farnèse, duc de Parme

Synopsis

À partir du milieu du XVIe siècle, les tensions politiques et religieuses créent un climat d'insurrection aux Pays-Bas, gouvernés depuis l'Espagne par Philippe II. Ce début de la guerre de Quatre-Vingts Ans met en péril la forte position économique d'Anvers. La « Furie espagnole » du 4 novembre 1576, au cours de laquelle des troupes espagnoles mutinées faute de solde mettent la ville à sac, exacerbe le ressentiment des Anversois envers les Espagnols. En 1577, des rebelles protestants s'emparent du pouvoir municipal et créent la république d'Anvers.

En 1578, le roi Philippe II nomme un nouveau gouverneur des Pays-Bas : Alexandre Farnèse, duc de Parme. En mai de l'année suivante, les provinces wallonnes se réconcilient avec leur roi, donnant au duc de Parme une base de pouvoir pour agir contre les poches de résistance plus septentrionales. En conséquence, le 29 juin 1579, Anvers rejoint l'Union d'Utrecht, une alliance défensive réunissant plusieurs provinces rebelles. Deux ans plus tard, la ville signe le « Plakkaat van Verlatinghe » (Acte d’Abjuration), qui déchoit Philippe II de sa souveraineté sur les Pays-Bas. Dans le cadre de sa contre-offensive, le duc de Parme utilise une technique de blocus, consistant à isoler les villes rebelles en prenant le contrôle des campagnes invironnantes et de toutes les voies d'accès terrestres et maritimes. En outre, il facilite les capitulations en présentant des conditions de reddition modérées. En 1584, le duc de Parme avait ainsi repris le contrôle de la plupart des centres de résistance dans les provinces méridionales des Pays-Bas, après quoi il tourne son attention vers Anvers. Philippe de Marnix de Sainte-Aldegonde est responsable de la défense de la ville en tant que maire extérieur d'Anvers. La ville et l'Escaut étant entourés de plusieurs forteresses, la rupture des digues permet d'inonder les polders environnants. Du nord, la Hollande et la Zélande envoient des navires pour approvisionner et soutenir les défenses de la ville importante.

En juillet 1584, le duc de Parme arrive près d'Anvers, à la tête d'une armée relativement restreinte, composée d'environ 10 000 hommes. Il occupe les environs, reprend les fortifications existantes et en construit toute une série de nouvelles. Cependant, il ne dispose pas de la flotte nécessaire pour fermer l'Escaut, dont la largeur peut atteindre plusieurs centaines de mètres. Cela permet aux forces navales de Hollande et de Zélande de continuer à soutenir la ville. Avec l'aide d'ingénieurs italiens, le duc élabore un plan très ambitieux considéré comme impossible : bloquer le fleuve au moyen d'un pont flottant. Sa construction commence en novembre 1584 et s'achève à la fin du mois de février 1585. Protégé par un fort sur chacune des rives, le pont flottant est constitué d'une trentaine de bateaux enchaînés les uns aux autres pour résister au flux de l'Escaut. Anvers est maintenant complètement coupée de ses approvisionnements.

Dans un premier temps, la flotte hollando-zélandaise et les habitants d'Anvers tentent d'unir leurs forces pour rompre le siège au niveau du pont flottant. L'ingénieur italien Frederico Giambelli, qui vit à Anvers, propose ses services à Marnix. Une de ses idées est de construire des brûlots chargés de poudre à canon. Le 4 avril, deux brûlots sont déployés, dont l'un atteint le pont flottant. L'énorme explosion provoque des dégâts considérables et crée une brèche dans le pont. Des centaines d'hommes périssent dans l'opération, le duc de Parme lui-même évitant la mort de justesse. La stupeur provoquée par l'explosion et la mauvaise communcation entre les assiégés et leurs alliés permettent à Parme de fermer la brèche avant que la flotte hollando-zélandaise ne puisse réagir.

explosion du brûlot

Les rebelles se tournent vers la digue Kouwensteinsedijk (qui va de Stabroek à l'Escaut), afin d'y forcer le passage. Entre-temps, Parme avait construit cinq forts autour de cette digue, qu'il utilise comme une extension stratégique de son pont flottant. Bien que les polders aient été inondés en raison de la rupture antérieure de plusieurs digues, la digue de Kouwenstein, fortement défendue, permet d'empêcher la flotte hollando-zélandaise d'utiliser ces zones inondées pour atteindre la ville.

l'attaque du Kouwensteinsedijk via les polders inondés

Des plans sont élaborés pour attaquer la digue des deux côtés via les polders inondés. Une première tentative échoue le 7 mai lorsqu'à la suite d'un malentendu, les navires anversois ne se présentent pas pour soutenir la flotte hollando-zélandaise. Le 26 mai, la grande offensive commence, les rebelles déployant environ 200 navires contre la digue. Les premières troupes parviennent à mettre pied à terre, prennent position et commencent à percer la digue. Cependant, lorsque le duc de Parme arrive sur place, les chances commencent à changer. Des milliers de soldats s'affrontent sur l'étroite digue, dans une bataille sanglante qui occasionne de lourdes pertes des deux côtés. À mesure que la marée se retire, les navires des insurgés restent coincés, alors que d'autres dérivent, laissant des soldats derrière eux. Gagnant progressivement du terrain, le duc de Parme finit par conserver cette position cruciale.

Ce nouvel échec et le fait qu'il ne reste des provisions que pour un bon mois laissent peu d'espoir aux Anversois. Le 17 août, Anvers se rend. La ville doit reconnaître le catholicisme comme sa seule foi et se placer à nouveau sous l'autorité du roi Philippe II. Conformément à la politique du duc Parme de ne pas agir de manière trop répressive, Anvers se voit restituer tous ses privilèges et aucune garnison espagnole n'est placée dans la ville. Tous les protestants de la ville ont quatre ans pour se convertir au catholicisme, ou pour quitter la ville. Une énorme « fuite des cerveaux » s'ensuit, et beaucoup quittent la ville dans les années qui suivent, notamment pour les autres zones rebelles du nord.

La chute d'Anvers est donc souvent considérée aujourd'hui comme le moment de la scission effective des Pays-Bas. Le Nord finira par s'unir à la République des Sept Provinces Unies, tandis que le Sud restera sous l'autorité de l'Espagne, puis de l'Autriche des Habsbourg. L'âge d'or d'Anvers est désormais définitivement terminé. Bien que la ville continue à jouer un rôle économique et culturel important au cours des siècles qui suivent, tant dans les Pays-Bas méridonaux que dans le nord-ouest de l'Europe, c'est Amsterdam qui lui ravit le rôle de grande métropole commerciale.

 

Auteur : Michael Gasthuys, étudiant VUB

 

Littérature

  • VAN REYD Everhard (édité par TREU H.A.), “van Reyd Everhard over de strijd die leidde tot de val van Antwerpen - 15 augustus 1585”, dans: Stichting Menno van Coehoorn, Utrecht: Stichting van Coehoorn, 1985-1986 p. 9-14.
  • GEYL Pieter, 1958, “The revolt of the Netherlands”, Londres: Ernest Benn, 1958 (2ième édition).
  • NIEUWDORP Hans, “1585-1985. Antwerpen en de scheiding der Nederlanden: Tentoonstellingen, Voordrachten, Historische En Folk[l]oristische Manifestaties”, Anvers: Gemeentekrediet, 1985.
  • GROEN Petra, VAN NIMWEGEN Olaf e.a., “De Tachtigjarige Oorlog. Van Opstand naar geregelde oorlog. 1568-1648”, Amsterdam: Boom, 2013
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